Coucou,
Nous quittons Sucre pour Potosi, à
4070 m d'altitude. Cette ville, fondée en 1545, a été créée et a
prospéré grâce à ses mines d'argent, mais elle s'est appauvrie à
mesure que s'épuisaient les réserves de minerais. Elle a été la
cité la plus grande et la plus riche d'Amérique; elle a compté
jusqu'à 200 000 habitants au XVII ème siècle et 80 églises! La légende
raconte qu'un berger inca parti à la recherche d'un lama égaré fit
un feu au pied d'une montagne et sous ses yeux, le sol se mit à
fondre faisant apparaître un liquide argenté.
On raconte que la quantité d'argent
extraite du Cerro Rico ("montagne riche" en espagnol) aurait pu suffire à construire un pont
d'argent entre Potosi et l'Espagne et qu'on pouvait encore en
transporter beaucoup par ce même pont. La santé économique du
Royaume d'Espagne dépendait totalement des cargaisons d'argent que
les bateaux transportaient jusqu'à lui. Alors, quand un bateau
coulait ou se faisait attaquer par des pirates, il fallait s'arranger
avec les banques étrangères auprès desquelles la couronne était
endettée.
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El Cerro Rico |
Pour augmenter la productivité, les
Espagnols forçaient leurs esclaves à travailler dans la mine 4 mois
d'affilée, sans voir la lumière du jour. Le travail étant très
meurtrier, ils firent venir des milliers d'esclaves africains. Ceux qui n'étaient pas morts pendant le trajet
mouraient rapidement en arrivant, trop fragilisés pour supporter
l'altitude et le froid.
Les 35000 Boliviens descendants
d'esclaves vivent aujourd'hui principalement dans les Yungas, zone de
transition entre les Andes et l'Amazonie. Ils y cultivent des fruits
tropicaux, mais surtout de la coca.
Au début du XIX ème siècle, les
filons s'épuisèrent et la population passa à 10000 habitants.
Début XXème, la demande en étain offrit un petit sursaut à la
ville. Aujourd'hui, ce sont le zinc et le plomb qui sont
essentiellement extraits des mines. Pour vous donner une idée de la
condition des mineurs, jusqu'en 2008, la livre d'étain coûtait 19
bolivianos (1,90 euros) sur le marché mondial et le salaire mensuel
moyen d'un mineur s'élevait à 3000 bolivianos (300 euros). En
2008, le prix de la livre a chuté à 7 bolivianos (70 centimes) et
le salaire à 280 bolivianos (28 euros)...
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Rouages pour extraire l'argent |
Aujourd'hui, à Potosi, une coopérative
produit 400 Kg d'argent par jour (il y a 33 coopératives). Le
salaire mensuel moyen pour un mineur qui travaille 8 heures par jour
5 ou 6 jours par semaine est de 1000 bolivianos, soit une centaine
d'Euros. Les mineurs extraient les roches, tirent des wagons de 1,2
tonne à 2 ou 3, les rassemblent dans des sacs à coups de pelles,
tout cela dans des températures pouvant atteindre 45° au 3ème
niveau, 60° aux 4ème et 5ème niveaux. C'est l'enfer. On y a passé
2 heures et on n'a pas envie d'en visiter d'autres. L'air est
irrespirable, l'odeur est difficilement supportable: on respire de la
poussière de silice, du gaz arsénique, des vapeurs d'acétylène et
de l'amiante. On suffoque, la gorge nous pique au bout de 10 minutes,
on tousse; puis on se retrouve dans un sauna. On essaie
lamentablement de donner deux coups de pelle : il faut de
l'entraînement pour y mettre plus de 3 cailloux.
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Mineurs à l'ouvrage |
Tous les guides
sont d'anciens mineurs. Le nôtre, Rolando, a travaillé 5 ans dans
la mine avant que sa famille lui impose d'arrêter et l'aide à
financer sa formation de guide. Il n'hésite pas à mettre la main à
la pâte, ce que les mineurs doivent apprécier.
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Rolando |
Les mineurs pensent que le minerai
qu'ils extraient des profondeurs de la terre appartient au diable.
Donc, pour obtenir sa bienveillance, chaque premier vendredi du mois,
ils font une offrande à sa représentation, à l'intérieur de la
mine: alcool à 96° (qu'ils ingèrent eux-mêmes en grande
quantité), feuilles de coca, cigarettes de coca... Et ils
recommencent le dernier vendredi du mois pour le remercier de sa
protection.
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Le diable en personne |
Les mineurs ont eu du mal à accepter
la présence de touristes au début. Aujourd'hui, ils les voient d'un
meilleur oeil car 15% du prix de la visite (1,50€) revient à leur
coopérative et ces recettes sont consacrées à la distribution à
Noël des mets de consommation de base. Et aussi parce que les
visiteurs n'arrivent pas les mains vides: avant la visite de la mine,
on passe par le marché des mineurs où l'on achète dynamite,
boissons sucrées, feuilles de coca.
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JB, avant la mine |
Chaque matin, avant d'entrer dans la
mine, les mineurs se regroupent pour mâcher la coca. Afin de former
une boule qu'ils conserveront 3 heures dans la joue, il faut mettre
en bouche 500 feuilles, une à une. La coca, déjà utilisée par les
Incas, leur permet de mieux résister à la faim et à la fatigue. Il
ne mangent rien pendant leur journée de travail. Ils ne peuvent pas
aller aux toilettes (des émanations de méthane pourraient provoquer
des explosions!). A la fin de la semaine, ils essaient de vendre ce
qu'ils ont extrait au meilleur prix.
La maladie qui frappe le plus les
mineurs est la silicose (les poumons sont attaqués par l'inhalation
de poussière de silice). Ils en meurent généralement après 10 ou
15 ans passés dans la mine. Le mineur peut prendre sa retraite quand
il ne lui reste plus que la moitié de sa capacité pulmonaire. La
pension est alors de 15 $ par mois. En moyenne, une quinzaine de
mineurs meurent d'accidents dans la mine chaque année.
D'ici 10 ans, le travail sous-terrain
cessera, n'offrant plus de filons. L'extraction à ciel ouvert qui le
remplacera fera ainsi diminuer peu à peu le Cerro Rico, jusqu'à sa
disparition...
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Lydie, Germinal le retour |
Nous avons visité un couvent à Potosi. Les richissimes familles des soeurs offraient des chapelles d'or en guise de "dot".
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Un des cloîtres du couvent |
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Façade de style mestizo d'une église |
Le dimanche nous sommes allés, comme de nombreux habitants de Potosi, nous baigner dans des thermes d'eau chaude à proximité de la ville. Il s'agit d'un cratère dont l'eau au centre bouillonne. Il se nomme l'oeil de l'Inca.
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Ojo del Inca |